Utopie réalisée, la Cité de Clairvivre est un endroit atypique, de ceux qui intriguent, et dont l’histoire fascine. Ici, au beau milieu des champs, des arbres et des chemins : une ville en miniature.

Juchée sur un promontoire, la Cité de Clairvivre déploie ses façades blanches en direction du soleil, afin de permettre à ses habitants de profiter des meilleures conditions climatiques possibles. Et cela a son importance, surtout pour les plus fragiles.

Construite au début des années 30 pour accueillir et soigner les soldats victimes du gaz moutarde utilisé pendant la Première Guerre Mondiale, la Cité de Clairvivre avait pour objectif de permettre à ces anciens combattants de se réadapter à une vie « normale », en leur offrant des soins de qualité, mais aussi en leur permettant de vivre dans un cadre agréable avec leur famille, tout en ayant la possibilité d’exercer un travail compatible avec leur état de santé.

Pour cela, Clairvivre disposait de tout le nécessaire : un hôpital, de nombreux pavillons d’habitations confortables et modernes, des écoles, des commerces, des ateliers, des lieux de convivialité – le tout dans un cadre naturel calme et reposant, à proximité de la forêt.

Imaginé par le médecin Albert Delsuc, et conçu par l’architecte Pierre Forestier, le projet de Clairvivre naît donc d’une utopie humaniste et sociale : offrir lumière et clarté après la terreur, et accompagner la guérison complète des blessés du poumon et malades de la tuberculose en favorisant leur bien être.

La gestion de la Cité suivait le modèle de l’autosuffisance. Chacun y travaillait suivant ses possibilités et ses aptitudes, et le produit de ce travail bénéficiait directement à l’ensemble de la communauté.

Photographie d’archive – Juillet 1933 : inauguration de la Cité de Clairvivre (source : CNAP)

Par son architecture et la philosophie qui l’accompagne, Clairvivre évoque certaines unités d’habitation de Le Corbusier, et d’autres projets de vie collective comme le Familistère de Guise, fondé par Jean-Baptiste Godin au XIXème siècle. 

Au fil du temps et des crises traversées par l’Histoire, la Cité de Clairvivre a continué à mettre en application son idéal socialiste : après avoir accueilli dès 1937 des réfugiés espagnols fuyant la Guerre civile, elle devint la base des hospices civils de Strasbourg, contraints de quitter l’Alsace en 1939, suite à l’avancée de l’armée allemande.

Important lieu de Résistance dans la région, la Cité de Clairvivre fut un refuge pour de nombreux exilés pendant la Seconde Guerre Mondiale, et un lieu de sûreté pour les maquisards, qui venaient s’y faire soigner.  

Aujourd’hui, la Cité de Clairvivre reste ancrée dans une démarche inclusive et sociale. Devenu Établissement Public Départemental, l’endroit se consacre à l’accueil et à l’accompagnement de personnes handicapées grâce à plusieurs structures d’hébergement, de formation et de travail.

De nombreuses formations qualifiantes y sont possibles, de l’horticulture à la cordonnerie, en passant par la cuisine et la vente.

Disposant d’une centrale thermique fonctionnant avec de la sciure de bois fournie par des scieries locales, d’une station d’épuration, de fruits et légumes produits sur place, Clairvivre est un modèle d’autonomie, et ce depuis sa fondation. 

Ce dimanche, les rues de la Cité sont bien calmes. La lumière d’un soleil timide joue avec les tons pastels et délavés des immeubles. La forêt n’est jamais loin.

En longeant les maisons aux volets clos, les jardins aux pelouses bien tondues et en empruntant les chemins de randonnée tous proches, il est facile de se laisser traverser par les différentes époques qui composent l’histoire de Clairvivre. Un lieu passionnant, qui poursuit sa route, fidèle à l’esprit de ses créateurs.

La Cité de Clairvivre

Située sur la commune de Salagnac, au Nord-Est du département de la Dordogne. La Corrèze est toute proche.
En complément d’une visite, de nombreux ouvrages et ressources en ligne permettent de se plonger dans l’histoire de Clairvivre. Par exemple, le livre « Clairvivre, une ville à la campagne » de Pierre Moreau, ou encore cette séquence vidéo réalisée par Pierre Guichard « Salagnac-Clairvivre, une commune à deux visages« .

Aujourd’hui, la Cité de Clairvivre accueille 450 personnes en situation de handicap, ainsi que 330 professionnels.